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L’automobile s’arrêta près de quelques maisons noircies par l’incendie.

— Vous allez être obligés de descendre, leur dit le nouvel officier qui les guidait. On ne peut faire qu’à pied le petit trajet qui nous reste à faire. Lacour et Desnoyers se mirent donc à marcher sur la route ; mais l’officier les rappela.

— Non, non, leur dit-il en riant. Le chemin que vous prenez serait dangereux pour la santé. Mais voici un petit chemin où nous n’aurons pas à craindre les courants d’air.

Et il leur expliqua que les Allemands avaient des retranchements et des batteries sur la hauteur, à l’extrémité de la route. Jusqu’au point où les voyageurs étaient parvenus, le brouillard du matin les avait protégés contre le tir de l’ennemi ; mais, un jour de soleil, l’apparition de l’automobile aurait été saluée par un obus.

Ils avaient devant eux une immense plaine où l’on ne voyait âme qui vive, et cette plaine présentait l’aspect qu’en temps ordinaire elle devait avoir le dimanche, lorsque les laboureurs se tenaient chez eux. Çà et là gisaient sur le sol des objets abandonnés, aux formes indistinctes, et on aurait pu les prendre pour des instruments agricoles laissés sur les guèrets, un jour de fête ; mais c’étaient des affûts et des caissons démolis par les projectiles ou par l’explosion de leur propre chargement.