Page:Blasco-Ibáñez - Les Quatre Cavaliers de l’Apocalypse.djvu/335

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Puis, désignant à l’horizon une petite ligne sombre :

— C’est le bois que vous voyez là-bas, ajouta-t-il. Veuillez prendre mes jumelles et vous distinguerez nettement l’objectif.

Il déploya ensuite une photographie énorme, un peu floue, sur laquelle était tracé un éventail de lignes rouges pareil à celui de la carte.

— Nos aviateurs, continua-t-il, ont pris ce matin quelques vues des positions ennemies. Ceci est un agrandissement exécuté par notre atelier photographique. D’après les renseignements fournis, deux régiments allemands sont campés dans le bois. Vous plaît-il que nous commencions le tir tout de suite, monsieur le sénateur ?

Et, sans attendre la réponse du personnage, le commandant envoya un signal télégraphique. Presque aussitôt résonnèrent dans le poste une quantité de timbres dont les uns répondaient, les autres appelaient. L’aimable chef ne s’occupait plus ni de Lacour ni de Desnoyers ; il était à un téléphone et il s’entretenait avec des officiers éloignés peut-être de plusieurs kilomètres. Finalement il donna l’ordre d’ouvrir le feu, et il en fit part au personnage.

Le sénateur était un peu inquiet : il n’avait jamais assisté à un tir d’artillerie lourde. Les canons se trouvaient presque au-dessus de sa tête, et sans doute la voûte de l’abri allait trembler comme le pont d’un vaisseau qui lâche une bordée. Quel fracas assour-