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de toile blanche, unies l’une à l’autre et bien pleines, qui ressemblaient à une double saucisse : c’était la charge d’une de ces pièces. La bourse que l’on ouvrit laissa voir des paquets de feuilles couleur de rose, et le sénateur et son compagnon s’étonnèrent que cette pâte, qui avait l’aspect d’un article de toilette, fût un terrible explosif de la guerre moderne.

Un peu plus loin, au point culminant de la croupe, il y avait une tour à moitié démolie. C’était le poste le plus périlleux de tous, celui de l’observateur. Un officier s’y plaçait pour surveiller la ligne ennemie, constater les effets du tir et donner les indications qui permettaient de le rectifier.

Près de la tour, mais en contre-bas, était situé le poste de commandement. On y pénétrait par un couloir qui conduisait à plusieurs salles souterraines. Ce poste avait pour façade un pan de montagne taillé à pic et percé d’étroites fenêtres qui donnaient de l’air et de la lumière à l’intérieur. Comme Lacour et Desnoyers descendaient par le couloir obscur, un vieux commandant chargé du secteur vint à leur rencontre. Les manières de ce commandant étaient exquises ; sa voix était douce et caressante comme s’il avait causé avec des dames dans un salon de Paris. Soldat à la moustache grise et aux lunettes de myope, il gardait en pleine guerre la politesse cérémonieuse du temps de paix. Mais il avait aux poignets des pansements : un éclat d’obus lui avait fait cette double