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gensola se promenait au bois de Boulogne avec une de ses compagnes de « siège » (mais il ne fit point part de cette particularité à Marcel), il avait appris par les éditions spéciales des journaux que la bataille s’était livrée tout près de la ville et que cette bataille était une grande victoire.

— Ah ! monsieur Desnoyers, j’ai beaucoup vu et je puis raconter de grandes choses !

Le père de Jules était si content de ces conversations qu’il conçut pour le bohème une bienveillance bientôt traduite par des offres de service. Les temps étaient durs, et Argensola, contraint par les circonstances à vivre loin de sa patrie, avait peut-être besoin d’argent. Si tel était le cas, Marcel se ferait un plaisir de lui venir en aide et mettrait des fonds à sa disposition. Il le ferait d’autant plus volontiers que toujours il avait beaucoup aimé l’Espagne : un noble pays qu’il regrettait de ne pas bien connaître, mais qu’il visiterait avec le plus grand intérêt après la guerre.

Pour la première fois de sa vie, Argensola répondit à une telle offre par un refus où il mit non moins de dignité que de gratitude. Il remercia vivement M. Desnoyers de la délicate attention et de l’offre généreuse ; mais heureusement il n’était pas dans la nécessité d’accepter ce service. En effet, Jules l’avait nommé son administrateur, et comme, en vertu des nouveaux décrets concernant le moratorium, la Banque avait consenti enfin à verser mensuellement