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faient, d’officiers qui vociféraient. Au jour, le château et le parc étaient déserts, quoique le drapeau de la croix rouge continuât à flotter au sommet de la tour.

Cette solitude ne dura pas longtemps. Un bataillon d’infanterie allemande fit irruption dans le parc avec ses fourgons, ses chevaux de trait et de selle, et se déploya le long des murs de clôture. Des soldats armés de pics y ouvrirent des créneaux, et, dès que les créneaux furent ouverts, d’autres soldats, déposant leurs sacs pour être plus à l’aise, vinrent s’agenouiller près des ouvertures. Interrompu depuis quelques heures, le combat reprenait de plus belle, et, dans les intervalles de la fusillade et de la canonnade, on entendait comme des claquements de fouet, des bouillonnements de friture, des grincements de moulin à café : c’était la crépitation incessante des fusils et des mitrailleuses. La fraîcheur du matin couvrait les hommes et les choses d’un embu d’humidité ; sur la campagne flottaient des traînées de brouillard qui donnaient aux objets les contours incertains de l’irréel ; le soleil n’était qu’une tache pâle s’élevant entre des rideaux de brume ; les arbres pleuraient par toutes les rugosités de leurs branches.

Un coup de foudre déchira l’air, si proche et si assourdissant qu’il paraissait avoir éclaté dans le château même. Marcel chancela comme s’il avait reçu un choc dans la poitrine. Un canon venait de