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volontiers, se fit un devoir d’intervenir. Il dit donc au commandant qu’il connaissait ce garçon, — par le fait, il ne se souvenait pas de l’avoir jamais vu, — et qu’il le croyait à peine âgé de dix-neuf ans.

— Mais, repartit Blumhardt, le secrétaire de la mairie vient d’avouer qu’il a vingt ans !

— Mensonge ! hurla la mère. Le secrétaire a fait erreur ! Il est vrai que mon fils est robuste pour son âge, mais il n’a pas vingt ans. Monsieur Desnoyers vous l’atteste !

— Au surplus, ajouta Marcel, même s’il les avait, serait-ce une raison pour le fusiller ?

Blumhardt haussa les épaules sans répondre. Maintenant qu’il exerçait ses fonctions de chef, il n’attachait plus aucune importance à ce que lui disait le châtelain.

— Avoir vingt ans n’est pas un crime, insista Marcel.

— Assez ! interrompit rudement Blumhardt. Ce n’est ni votre affaire ni la mienne. Je suis homme de conscience, et, puisqu’il y a doute, je vais consulter le général. C’est lui qui décidera.

Ils ne prononcèrent plus un mot. Devant le pont-levis, l’escorte s’arrêta avec son prisonnier. De l’un des appartements sortaient les accords d’un piano, et cela parut de bon augure à Marcel : c’était sans doute le comte qui touchait de cet instrument, et un artiste ne pouvait être inutilement cruel. Introduits