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de suite la conversation avec le châtelain. Il expliqua d’abord qu’il n’était qu’un universitaire métamorphosé en soldat : l’ordre de mobilisation l’avait surpris alors qu’il était professeur dans un collège et à la veille de contracter mariage. Cette guerre avait dérangé tous ses plans.

— Quelle calamité, monsieur ! Quel bouleversement pour le monde ! Nombreux étaient ceux qui voyaient venir la catastrophe, et il était inévitable qu’elle se produisît un jour ou l’autre. La faute en est au capital, au maudit capital.

Le sous-officier était socialiste. Il ne dissimulait point la part qu’il avait prise à quelques actes un peu hardis de son parti, et cela lui avait valu des persécutions et des retards dans son avancement. Mais la Social-Démocratie était acceptée maintenant par l’empereur et flattée par les junkers les plus réactionnaires. L’union s’était faite partout. Les députés avancés formaient au Reichstag le groupe le plus docile de tous. Quant à lui, il ne gardait de son passé qu’une certaine ardeur à anathématiser le capitalisme coupable de la guerre.

Marcel se risqua à discuter avec cet ennemi qui semblait d’un caractère doux et tolérant.

— Le vrai coupable ne serait-il pas le militarisme prussien ? N’est-ce pas le parti militariste qui a cherché et préparé le conflit, qui a empêché tout accommodement par son arrogance ?