Page:Blasco-Ibáñez - Les Quatre Cavaliers de l’Apocalypse.djvu/262

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le capitaine donna des ordres à un soldat, qui courut chercher un morceau de la craie dont on se servait pour marquer les logements militaires. Otto, qui voulait protéger son oncle, traça sur le mur cette inscription :

Bitte, nicht plündern.
Es sind freundliche Leute[1].

Et il expliqua à Marcel le sens des mots qu’il venait d’écrire. Mais celui-ci se récria :

— Non, non, je refuse une protection ainsi motivée. Je n’éprouve aucune bienveillance pour les envahisseurs. Si je me suis tu, c’est parce que je ne pouvais pas faire autrement.

Alors le neveu, sans rien dire, effaça la seconde ligne de l’inscription ; puis, d’un ton de pitié sarcastique :

— Adieu, mon oncle, ricana-t-il. Nous nous reverrons bientôt avenue Victor-Hugo.

En retournant au château, Marcel aperçut à l’ombre d’un bouquet d’arbres le comte qui, en compagnie de ses deux officiers d’ordonnance et d’un chef de bataillon, dégustait le café en plein air. Le comte obligea le châtelain à prendre une chaise et à s’asseoir, et ces messieurs, tout en causant, firent une grande consom-

  1. Prière de ne pas piller. Ce sont des personnes bienveillantes.