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l’avaient éloigné de la cour ; mais, au dire du capitaine, ce n’était que des calomnies de journaux socialistes. Malgré tout, l’empereur, dont le comte avait été le condisciple, lui gardait en secret toute son amitié. Nul n’avait oublié le ballet des Caprices de Shéhérazade, représenté avec un grand faste à Berlin sur la recommandation du puissant camarade.

Le comte crut que, si Marcel gardait le silence, c’était par intimidation, et, afin de le mettre à son aise, il lui adressa le premier la parole. Quand Marcel eut expliqué qu’il n’avait quitté Paris que depuis trois jours, les assistants s’animèrent, voulurent avoir des nouvelles.

— Avez-vous vu les émeutes ?…

— La troupe a-t-elle tué beaucoup de manifestants ?…

— De quelle manière a été assassiné le président Poincaré ?…

Toutes ces questions lui furent adressées à la fois. Marcel, déconcerté par leur invraisemblance, ne sut d’abord quoi répondre et pensa un instant qu’il était dans une maison d’aliénés. Des émeutes ? L’assassinat du président ? Il ne savait rien de tout cela. D’ailleurs, qui auraient été les émeutiers ? Quelle révolution pouvait éclater à Paris, puisque le gouvernement n’était pas réactionnaire ?

À cette réponse, les uns considérèrent d’un air de pitié ce pauvre benêt ; d’autres prirent une mine