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des événements lui inspirait un étrange optimisme, fondé sur la foi instinctive en la justice. Il n’était pas possible que de telles horreurs demeurassent impunies.

— L’invasion de la Belgique est une abominable félonie, disait-il, et toujours une félonie a disqualifié son auteur.

Il dirait cela avec conviction, comme si la guerre était un duel où le traître, mis au ban des honnêtes gens, se voit dans l’impossibilité de continuer ses forfaits.

L’héroïque résistance des Belges le confirma dans ses chimères et lui inspira de vaines espérances, Les Belges lui parurent des hommes surnaturels, destinés aux plus merveilleuses prouesses. Pendant quelques jours, Liège fut pour lui une ville sainte contre les remparts de laquelle se briserait toute la puissance germanique. Puis, quand Liège eut succombé, sa foi inébranlable s’accrocha à une autre illusion : il y avait dans l’intérieur du pays beaucoup de Lièges ; les Allemands pouvaient avancer ; la difficulté serait pour eux de sortir. La reddition de Bruxelles ne lui donna aucune inquiétude : c’était une ville ouverte dont l’abandon était prévu, et les Belges n’en défendraient que mieux Anvers. L’avance des Allemands vers la frontière française ne l’alarma pas davantage : l’envahisseur trouverait bientôt à qui parler. Les armées françaises étaient dans l’Est, c’est-à-dire à l’endroit où elles devaient