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pays d’origine : la France avait fait son temps. Ceux qui triomphaient aujourd’hui, c’étaient les peuples du Nord, surtout cette Allemagne qu’il avait vue de près et dont il avait admiré la discipline et la rude organisation. Que pouvait faire une république corrompue et désorganisée contre l’empire le plus solide et le plus fort de la terre ? « Nous allons à la mort, pensait-il. Ce sera pis qu’en 1870. »

L’ordre et l’entrain avec lequel les Français accouraient aux armes et se convertissaient en soldats, l’étonnèrent prodigieusement et diminuèrent un peu son pessimisme. La masse de la population était bonne encore ; le peuple avait conservé sa valeur d’autrefois ; quarante-quatre ans de soucis et d’alarmes avaient fait refleurir les anciennes vertus. Mais les chefs ? Où étaient les chefs qui conduiraient les soldats à la victoire ?

Cette question, tout le monde se la posait. L’anonymat du régime démocratique et l’inaction de la paix avaient tenu le pays dans une complète ignorance des généraux qui commanderaient les armées. On voyait bien ces armées se former d’heure en heure, mais on ne savait à peu près rien du commandement. Puis un nom commença à courir de bouche en bouche : « Joffre… Joffre… » Mais ce nom nouveau ne représentait rien pour ceux qui le prononçaient. Les premiers portraits du généralis-