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assis à une table près du peintre et de son ami. Entraînés par le flot de l’enthousiasme général, ils étaient descendus jusqu’aux boulevards « afin de voir la guerre de plus près ». La langue étrangère que parlaient entre eux ces voisins de table donna au mari une haute idée de leur importance.

— Croyez-vous, messieurs, leur demanda-t-il, que l’Angleterre marche avec nous ?

Argensola, qui n’en savait pas plus que son interlocuteur, répondit avec assurance :

— Sans aucun doute. C’est chose décidée.

— Vive l’Angleterre ! s’écria le petit vieux en sa mettant debout.

Et, sous les regards admiratifs de sa femme, il entonna une vieille chanson patriotique, en marquant par des mouvements de bras le rythme du refrain.

Jules et Argensola revinrent pédestrement à la rue de la Pompe. Au milieu des Champs-Elysées, ils rejoignirent un homme coiffé d’un chapeau à larges bords, qui marchait lentement dans la même direction qu’eux, et qui, quoique seul, discourait à voix presque haute. Argensola reconnut Tchernoff et lui souhaita le bonsoir. Alors, sans y être invité, le Russe régla son pas sur celui des deux autres et remonta vers l’Arc de Triomphe en leur compagnie. C’était à peine si Jules avait eu précédemment l’occasion d’échanger avec l’ami d’Argensola quel-