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peuples étrangers se soumettent à notre influence. Et ce sont ces gens-là qui ensuite refusent de reconnaître notre supériorité !

Pour la première fois Argensola fit un geste approbatif, que ne suivit d’ailleurs aucun commentaire. Hartrott, qui avait surpris ce geste, lui attribua la valeur d’un assentiment complet, et cela l’induisit à reprendre :

— Mais notre supériorité est évidente, et, pour en avoir la preuve, nous n’avons qu’à écouter ce que disent nos ennemis. Les Latins eux-mêmes n’ont-ils pas proclamé maintes fois que les sociétés latines sont à l’agonie, qu’il n’y a pas de place pour elles dans l’organisation future, et que l’Allemagne seule conserve latentes les forces civilisatrices ? Les Français, en particulier, ne répètent-ils pas à qui veut les entendre que la France est en pleine décomposition et qu’elle marche d’un pas rapide à une catastrophe ? Eh bien, des peuples qui se jugent ainsi ont assurément la mort dans les entrailles. En outre, les faits confirment chaque jour l’opinion qu’ils ont de leur propre décadence. Il est impossible de douter qu’une révolution éclate à Paris aussitôt après la déclaration de guerre. Tu n’étais pas ici, toi, pour voir l’agitation des boulevards à l’occasion du procès Caillaux. Mais, moi, j’ai constaté de mes yeux comment réactionnaires et révolutionnaires se menaçaient, se frappaient en pleine rue. Ils s’y sont insultés