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elle ne pourra pas moins raconter que je suis venu, et dès lors vos précautions oratoires…

— Suffisent pour dérouter toute malice, interrompit le docteur. Hier soir j’avais commandé votre déjeuner, et annoncé que j’irais vous prendre à la gare. Donc, vous êtes ici parce que je vous y ai fait entrer d’autorité et c’est par politesse que vous subissez mes théories d’arboriculture.

— Je vois, dit Charles en souriant, qu’on peut être grand politique au village, dans la conduite de la vie privée.

— Vous en doutiez ? reprit le docteur. Vous avez même dit un mot profond, mais sans en saisir la portée, je gage. Il existe en effet une politique dans la vie privée : j’entends un art de manœuvrer les divers caractères dont on est entouré, d’en tirer tout le bien possible et d’en éviter les chocs, les inconvénients… Mais cette théorie nous mènerait trop loin. Vous avez hâte, n’est-ce pas ? de savoir pourquoi l’on ne voulait pas de vous à Sennecey ?

— Oui, certes.

— En deux mots : parce que M. Martin Limet, qui doit laisser son étude de notaire à son fils, serait bien aise de donner sa fille, avec une toute petite dot, à Julien Trassey.

— Vous supposez alors que ces deux hommes s’entendent pour détourner mon oncle de ses héritiers naturels, car Julien Trassey n’a pas de fortune et ne peut s’établir convenablement qu’aux dépens