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salle à manger où deux couverts étaient dressés sur la table ; cet accueil témoignait de la certitude de sa venue et du désir de le renseigner dès son débarquer. Charles fut reconnaissant de cet intérêt, et n’y soupçonna pas la moindre curiosité, ni le désir d’analyser, de dépecer une nouvelle conscience, plaisir rare pour le docteur qui s’ennuyait, à son dire, de pouvoir deviner, à première inspection de leurs visages, ce que pensaient ses concitoyens.

— Puisque vous n’avez pas faim, dit M. Cruzillat en désignant à Charles, du coin de l’œil, la servante qui entassait inutilement sur la table hors-d’œuvre et mets variés, et puisque vous êtes rassuré sur l’état de votre oncle que vous ne seriez pas admis à voir de si grand matin, allons faire un tour de jardin pour renouveler connaissance… Fanchette, je déjeûnerai plus tard, à l’heure habituelle.

Le jardin du docteur était un simple potager dont les bordures étaient garnies d’arbres fruitiers en quenouilles et d’où l’agrément était banni au profit du rapport. C’était affaire de principe et non de négligence ou d’avarice. La plus belle des roses ne valait pas une pomme pour M. Cruzillat, et il mettait à présenter les arbres de son verger et les légumes de son potager autant d’enthousiasme qu’un horticulteur à goûts plus poétiques en peut mettre à montrer une belle collection de fleurs ou quelques plantes rares.

Mais Charles ne se souciait guère de l’historique des greffes savantes, des procédés de culture à pro-