Page:Blandy - Un oncle a heritage.djvu/347

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ce n’est pas moi qui vous adresserai ces questions, c’est au nom de votre oncle, de mon parrain, que j’ai la mission de vous les transmettre.

Il était si grave que la jeune fille ne put douter de sa parole. Le vestibule était un lieu mal choisi pour une conférence de ce genre ; elle ouvrit la porte du salon et fit signe à Julien d’y entrer. Il refusa de s’asseoir, bien qu’elle l’y invitât, et, debout devant elle, il lui dit avec une autorité dans l’accent qu’elle n’avait jamais remarquée en lui :

— Mademoiselle, si votre frère guérissait et si, par un hasard quelconque, il vous retrouvait riche, auriez-vous la faiblesse de lui livrer votre fortune pour qu’il recommençât ce jeu hasardeux dont les mécomptes l’ont réduit à un si triste état ?

— Si jamais j’ai le bonheur de voir mon frère guéri, je partagerai avec lui le morceau de pain que je possède, mais, fussé-je riche, je ne lui confierais aucune somme d’argent ; je craindrais trop de lui fournir l’occasion d’une nouvelle rechute.

— Mais, s’il vous persécutait d’instances, s’il abusait de son ascendant fraternel ? si Mme Maudhuy se joignait à lui, auriez-vous la force de leur résister ?

— Je crois, dit Cécile, que je serais assez pénétrée du danger de céder pour leur résister à tous deux dans leur propre intérêt : je ne me suis jamais éprouvée contre autrui, mais j’ai appris à me résister à moi-même, et l’on prétend que c’est plus difficile.

Elle avait répondu d’abondance de cœur, naïve-