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rante du jais, il se pencha vers elle et lui dit tout bas :

— Nous étions meilleurs amis l’été dernier, Mademoiselle. Pourquoi ce changement ? Suis-je indiscret en vous demandant s’il vous est imposé ?

Avant d’ouvrir son cahier de musique, Cécile tourna la tête en arrière afin de s’assurer de la sécurité de leur tête-à-tête, puis elle répondit à Julien :

— Veuillez vous rapprocher pour tourner mes pages. Nous nous expliquerons plus aisément.

Ce fut ainsi, elle jouant à grand renfort de pédales un morceau à effet qui partait de lui-même sous ses doigts, lui, debout à sa droite, assez près d’elle pour frôler ses vêtements, qu’ils échangèrent un dialogue aussi incisif qu’un duel. Mais c’était un duel où un seul adversaire frappait ; où l’autre, sans même se défendre, recevait tous les coups.

Cécile débuta par cette réponse à la question de Julien :

— Je suis majeure, Monsieur, et personne ne m’impose plus rien. Ma mère a la bonne volonté de me livrer à mon propre discernement.

— Que vous ai-je donc fait ?

— À moi ?

Ce mot de Cécile fut lancé sur un point d’orgue qui l’accentua comme un cri de fière négation. Ce simple mot annulait tout le passé de muette entente de leurs deux cœurs, et comme si Cécile n’avait pas trouvé suffisant le dédain de cette excla-