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poids accablant de la rancune ; elle avait même cherché des raisons valables à cette intrusion nocturne dont le hasard l’avait rendue témoin.

Dans leur dernière entrevue, au musée du petit logis, Julien avait hésité à lui confier quelque chose. Elle l’avait arrêté, croyant comprendre à l’effort du jeune homme pour surmonter sa timidité, devinant à sa pâleur, à l’émotion de sa voix qu’il s’enhardissait jusqu’à un aveu, pour lequel il s’autorisait de l’assentiment de son parrain. Mais si Cécile s’était trompée ? Si Julien avait hésité simplement à lui emprunter ces deux volumes de Chomel ?…

Non, Cécile avait beau s’ingénier à trouver un rapport entre ces deux faits : il n’y en avait pas. Aux derniers moments de sa vie, l’oncle Carloman n’avait pu recommander à son filleul une chose aussi insignifiante que l’emprunt d’un dictionnaire, et l’eût-il fait, c’était une demande si aisée à adresser à l’héritière qu’il n’y avait pas à hésiter pour la formuler… En s’emparant de ces deux bouquins, Julien avait obéi à cette manie de collectionneur qui s’approprie ce qu’elle convoite. Lors de cette visite au petit logis, n’avait-il pas dit à Cécile que sauf le fonds de curiosités acquis par lui en bloc en même temps que les nouveaux meubles de la maison Maudhuy, le reste de sa collection ne lui avait presque rien coûté ? Il l’avait obtenu par voie d’échange, parfois même en demandant à des gens peu soucieux des objets antiques en leur possession de vouloir bien les lui céder. Cette