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sion au projet qui avait été révélé à Cécile par son oncle ? Dans le cours de sa maladie, M. Maudhuy ne pouvait avoir reporté ses vœux sur son filleul.

Le dîner fut triste. Les convives avaient épuisé les sujets qui les occupaient. Ils subissaient la lassitude des émotions supportées depuis trois jours ; mais pendant la soirée qui traîna les quarts d’heure lentement, Cécile remarqua une agitation bizarre chez son frère. Tantôt il restait enfoncé dans son fauteuil les sourcils rapprochés, le menton dans sa main, tantôt il parcourait le salon, toisait les meubles, déplaçait les jardinières, donnait des tapes de sa main à plat contre les murs. Si on lui demandait ce qu’il faisait là, il n’avait pas l’air d’entendre, et venait reprendre sur son fauteuil sa pose de sphinx boudeur.

Cécile le prit par le bras à un de ses brusques passages.

— Tu as la fièvre, lui dit-elle. Mère, Charles a la fièvre sûrement. Son pouls bat fort et vite. Sa peau est brûlante.

— Nous avons tous été surmenés, dit Carloman Moi j’ai passé par une crise qui m’a rudement secoué. Là-bas, en Amérique, j’ai vécu des années uniquement par la tête, aux affaires du matin au soir et y rêvant dans mon sommeil du soir au matin. Mon retour en France, cette mort d’un vieux parent qui m’a aidé de ses conseils, de sa sollicitude, parfois même de son argent, m’ont tout à coup fait revivre de la vie du cœur. C’est par la douleur que