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dont la partie basse était encore endormie sous un rideau de vapeurs. La montagne de Laives, le Mouron plus lointain ne lui donnèrent pas, à elle, la nostalgie des Alpes, puisqu’une larme involontaire coula sur sa joue et témoigna du regret qu’elle ressentait de les quitter.

Cécile ne voulait pas s’attendrir ; elle descendit rapidement le sentier en zig-zag qui s’ouvrait en face de la charmille, et, après avoir cueilli quelques pervenches qu’elle mit dans son nécessaire de poche, elle revint par les parterres d’un pas ralenti et si absorbée dans ses pensées, qu’elle ne songea à l’obstacle du cadran solaire élevé à la fourche des quatre allées, qu’au moment où elle allait s’y heurter.

Ce vieux cadran, posé sur son piédouche grossièrement tourné en colonne tronquée, comme il l’avait intéressée autrefois ! Cécile se souvenait de s’être hissée sur les bras de l’oncle Carloman pour voir de plus près l’angle d’ombre projeté par la plaque de fer sur le cadran. Elle avait aussi épelé sa devise et se l’était fait traduire :

Cogita ultima, pense à ta dernière heure !

Quel conseil profond tenait en ces deux mots ! Eh bien, à cette dernière heure, ce ne seraient pas les joies savourées qui compteraient, mais les sacrifices faits au devoir, et accomplis courageusement. Cette devise disait la vanité des agitations au profit d’intérêts matériels et, par contre, le prix d’une existence vouée au bien, soucieuse de son progrès