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ses parentes de Paris ; mais, après cet échange de banalités, la conversation expirait. Chacun était sous le coup de cette impression étrange qui saisit à l’instant des adieux. Les gens qui doivent s’éloigner paraissent déjà loin de ceux qui restent. La rupture des menus rapports quotidiens s’ébauche ainsi. Les uns, préoccupés du but lointain vers lequel ils vont s’acheminer, ne sont plus là, pour ainsi dire ; les autres sentent déjà une distance, celle de la pensée, s’établir entre eux et ceux qui s’apprêtent à les quitter.

Julien Trassey n’avait pas apporté ce soir-là son livre au salon ; mais il n’y fit qu’une courte apparition, et sa retraite fut remarquée par le docteur Cruzillat, qui en demanda le motif d’un air curieux.

— Mon fils a passé sept heures à cheval aujourd’hui, répondit Mme Trassey ; il a bien gagné de s’aller reposer plus tôt que de coutume.

— Ah ! ah ! fit le docteur en se frottant le nez de son index, par un geste qui lui était familier.

Le lendemain matin, Cécile était levée avec le jour. Elle descendit au rez-de-chaussée : les volets de l’oncle Carloman étant encore fermés, elle parcourut l’enclos et monta jusqu’au haut de la butte qu’on appelait le labyrinthe à cause de ses sentiers enchevêtrés qui s’embrouillaient en se croisant.

Parvenue au sommet de la petite élévation d’où la vue s’étendait assez loin, la jeune fille contempla le paysage que les rayons du soleil levant ranimaient