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marasme qui, disait-il, pouvait lui devenir fatal. En invoquant le bienfait de mon éducation que je lui devais en grande partie, en me rappelant l’asile et l’aide amicale que ma mère avait trouvés chez lui, il m’a prié de renoncer à mes idées et de me consacrer à ses dernières années. J’ai dû m’y résoudre. Je l’avoue, ce n’a pas été sans luttes — non contre M. Maudhuy ; je n’aurais voulu pour rien au monde blesser mon bienfaiteur — mais avec moi-même. J’ai passé quelques tristes années. Rien ne m’avait préparé au rôle que je devais jouer. Très sensible aux riantes beautés naturelles de notre pays, je répugnais aux détails de l’exploitation agricole. Tout ce tracas de récoltes, de marchés, ce va-et-vient de gros sous, de bestiaux et de charrues me semblait trivial. J’avais la nostalgie du champ de manœuvre et de ce clairon qui, pendant les cinq mois du siège de Paris, m’avait sonné le réveil. Mais le devoir, ce que je croyais mon devoir, m’enchaînait ici. Je n’ai donc été ni versatile, ni… lâche. Ce ne sont ni les dangers, ni les rigueurs de l’état militaire qui m’ont détourné de ma voie. J’ai mené ici une existence aussi rude et moins en rapport avec mes goûts, du moins au début.

— Ici, je proteste, s’écria Reine. Votre passion pour les fleurs, vos succès aux comices agricoles prouvent bien qu’en homme intelligent, vous avez eu l’esprit de vous intéresser à votre tâche obligée et vous auriez tort de me garder rancune, monsieur Julien, de ce que j’ai provoqué cette explication.