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Notre armée manque de bons sous-officiers. Je viens de lui en assurer un.

— Je me figurais, répondit Reine, que l’exemple est le meilleur sermon, l’instruction la plus efficace, si notre armée a un si grand besoin de sous-officiers, souhaitons que ce batelier ignore que vous lui conseillez un devoir patriotique dont, pour votre compte, vous vous êtes dispensé, après avoir fait parade publique de votre vocation militaire.

Si le ton de la jeune fille était resté celui d’une plaisanterie mutine, ses paroles avaient quelque chose de si agressif que Julien Trassey en fut blessé ; mais ce ne fut pas à Reine qu’il adressa sa justification.

— Mademoiselle, dit-il à Cécile en s’inclinant devant elle, peu vous importe que je sois militaire ou fermier, et il ne me serait jamais venu à l’esprit de vous entretenir de mon passé, du choix de ma carrière ; mais je tiens à votre estime et je me vois forcé de vous prouver que je ne mérite pas le reproche qui m’a été adressé devant vous… Je comptais suivre l’exemple de mon père ; il m’avait élevé dans l’idée que la première des fonctions sociales, c’est la défense de la patrie. Cette opinion de mon adolescence a été trop justifiée en 1870 pour être abandonnée par moi quand j’ai atteint l’âge d’homme. Mais à ce moment, j’ai dû faire à mon parrain, à ma mère, le dur sacrifice de renoncer à ma vocation. Votre oncle, resté seul, déçu dans l’espoir de fixer les siens auprès de lui, était plongé dans un