Page:Blandy - Un oncle a heritage.djvu/165

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

derniers rayons du soleil ; mais Cécile, animée du désir d’être utile, combattit les frayeurs de sa mère et, s’autorisant d’un demi-consentement, elle remit les guides à Mme Maudhuy, sauta légèrement à terre et descendit le talus de la route.

Julien, à genoux sur l’herbe du fossé, tenait à deux mains la cheville du blessé et faisait saigner la plaie qu’il y avait ouverte.

— Monsieur, dit la jeune fille en se baissant, ne faudrait-il pas essuyer un peu le sang avant de verser l’ammoniaque ? Voici mon mouchoir.

Julien s’en servit, tout en lui répondant tout bas :

— Vous n’êtes pas trop péniblement affectée de la vue de ce sang ? Moi, je me fais l’effet d’un bourreau. De grâce, mademoiselle, retirez-vous ; je crains que vos forces n’égalent pas votre courage.

— Il ne s’agit pas de moi, dit Cécile. Puis-je vous aider, à verser l’ammoniaque par exemple, pendant que vous tiendriez la plaie bien ouverte ?

— Il est certain que j’opérerai mieux et plus vite si vous ne répugnez point…

Ils abrégeaient leurs explications, s’entendant à demi-mot. La plaie était cautérisée, bandée lorsque Cécile s’aperçut que le vieux paysan laissait aller sa tête de tous les côtés et paraissait près de perdre connaissance. Jusque-là, il avait gémi tout bas, en se mordant les doigts pour ne pas crier, mais l’action corrosive de l’ammoniaque s’ajoutant à la somme de souffrances endurées, épuisait sa force de résistance.