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sans cesse auprès de vous ; vous craigniez pour mes ébats la rencontre de quelque vipère dans les mousses, mais j’étais emportée dans les fourrés par l’appât des belles fraises rouges ou par la curiosité de suivre les évolutions d’un écureuil. Un jour, je vous ai fait une belle frayeur en criant du haut de ma tête parce que j’avais vu un inoffensif orvet. Vous en souvient-il ?… et de notre cueillette de champignons que maman voulait nous faire jeter sous prétexte qu’ils allaient nous empoisonner ? mais une fois cuits, ils se trouvèrent si bons qu’il n’y en eut plus assez pour tout le monde, et on nous reprocha notre paresse à n’en avoir rapporté que si peu.

« Il y a une chose, mon cher oncle, que je n’ai jamais osé vous demander dans mes lettres officielles. J’appelle ainsi toutes celles où je n’osais causer avec vous et dont maman et mon frère épluchaient les phrases de peur qu’il ne s’y glissât un mot propre à vous choquer. Celle-ci n’est pas de ce style compassé, Dieu merci ! Voici donc ce que je voudrais savoir… mais auparavant je dois vous faire un aveu.

« Lorsque j’étais à Sennecey, vous savez que je me plaisais surtout au jardin. Je ne lui préférais que les champs, le grand espace ouvert devant moi. Mais vous ne pouviez toujours m’emmener, et quand vous me laissiez à la maison, je m’arrangeais pour passer en plein air le plus de temps possible.

« Il paraît que votre jardin est devenu une merveille de culture soignée ; mais il n’en était pas