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pour un jeune homme qui savait parler sa langue, Lina se reprocha de le mystifier et de le rendre ridicule aux yeux de son vieil admirateur qui ne cessait de rire, car elle dit à Julien Deval en lui montrant le frontispice du cahier de musique :

« Œuvres de Mozart ! Pardonnez-lui d’avoir eu de l’esprit quelquefois malgré sa nationalité, et pardonnez-moi de l’avoir fait applaudir ici malgré la prévention générale. »

Julien resta interdit en voyant que la candeur elle-même a ses ruses et l’innocence ses malices. Il ne montra pas de dépit et s’amusa le premier de son erreur. C’était tirer le meilleur parti possible d’une situation difficile. Il railla cette manie de juger légèrement qui est si française, et s’il regagna par ce naturel dans l’esprit de Lina tout ce qu’il avait perdu par son ignorance prétentieuse, Lina devint pour lui un être moins simple, moins uni, plus intéressant. Puis tout succès élève qui l’obtient. La musicienne qu’on venait d’applaudir et que M. Chainay disait être accomplie, valait mieux que cette jolie petite fille qui perdait tant à être comparée à Suzanne, et Julien s’attacha à ses pas avec une insistance qui finit par contrarier Lina. Non pas que M. Deval lui fût antipathique, loin de là,