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le maître italien d’avoir su tirer si bon parti d’une idée allemande, de l’avoir dégourdie et dégelée. M. Chainay, lors même que Lina ne lui eût pas montré sa petite supercherie, connaissait trop le catalogue des œuvres de Mozart pour se tromper aussi grossièrement, mais il crut avoir entendu cette sonate pour la première fois, tant Lina l’avait bien comprise et rendue.

Peut-être faut-il, pour rendre les grâces raphaëlesques de cette musique, pour en saisir le caractère et en exprimer les nuances, une âme heureuse, délicate, portée à un léger dédain de la vulgarité et des sots. À cette époque de sa vie, Lina était telle qu’il fallait pour la jouer, et si M. Chainay ne sentit pas tous les motifs de son identification avec le maître qu’elle traduisait, il rendit pourtant pleine justice à son talent, et s’autorisant de sa vieillesse et de l’impossibilité où il était de faire entendre à la musicienne ses éloges et ses remerciements, il baisa le bout de ses doigts déliés.

Julien Deval, qui venait de faire le tour du salon pour récolter des compliments à rapporter à Lina, vint lui faire part de l’enthousiasme général ; peu connaisseur en musique, il avait moins écouté que regardé la jeune fille et il avait plus remarqué son front inspiré, le pétil-