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polka ou Au Clair de la Lune, sans quoi vous nous endormirez. »

Lina écoutait, on le comprend, mais elle feuilletait les cahiers avec une gravité admirable. Julien s’approcha d’elle et lui transmit les conseils de M. Chainay en les agrémentant de quelques railleries à l’adresse de l’auditoire. Lina répondit au jeune homme :

« Musique allemande, musique ennuyeuse, c’est l’opinion française, je le sais. Allez rassurer tout le monde. Je vais jouer un petit air italien. »

Puis elle prit un autre cahier, en montrant à M. Chainay qu’elle choisissait la deuxième des quinze sonates pour piano de Mozart, dont le style rappelle la manière italienne.

Lina mit toute sa vivacité de jeune fille, tout son amour propre d’allemande à faire saillir l’originalité de cette sonate : la mélancolie de l’andante, les capricieuses arabesques dont les variations entourent la mélodie, le mouvement superbe du menuet et enfin l’élan fulgurant du finale alla turca. Le succès fut complet ; on applaudit avec conviction, car on savait gré à l’étrangère d’avoir joué de la musique gaie et d’avoir sacrifié ses prédilections nationales au plaisir de tous. Quelques personnes, un peu plus érudites, avaient reconnu le célèbre menuet et félicitaient