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alla donc au devant du jeune homme et l’amena au piano en lui disant :

— Puisque vous avez seul l’heureux privilége de pouvoir causer avec Mademoiselle Brülher, voulez-vous être mon interprète auprès d’elle ?

— Avec le plus grand plaisir, répondit Julien Deval qui venait de se décider à piquer Suzanne en se posant en attentif auprès de sa nièce.

— Eh bien ! je la vois qui feuillette Beethoven et qui hésite entre lui et Sébastien Bach. Dites-lui, je vous prie, qu’on ne goûtera pas cette musique-là. Pour deux ou trois enthousiastes, en me comptant, qu’elle charmerait, elle laisserait les autres peu satisfaits ou inattentifs. Ne nous le dissimulons pas, nous ne comprenons pas encore la sublimité des maîtres allemands ; nous les louons très-fort pour cacher qu’ils nous fatiguent. Nous apprécions les mélodies claires, les jolis flons flons, mais le sublime ! Ah ! c’est trop haut pour nous.

— Et comment vais-je exposer cette théorie à Mademoiselle Brülher ? J’y ai quelques scrupules, répondit Julien Deval. Croyez-vous que je lui donnerai bonne opinion de nous en lui disant : « Mademoiselle, comme vous avez affaire à un auditoire de niais, jouez-nous, je vous prie, une