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bientôt. Un regard de mon mari, ce soir, au bois des Pins, a été pour moi ce qu’est la sentence pour le condamné, le rappel à la dure nécessité oubliée tout un jour. Et pendant le temps que nous avons mis à rejoindre la voiture, après avoir parlé folie, j’ai parlé raison à Christian. Je lui ai dit tout ce qui me sépare de lui ; je lui ai demandé mes lettres ; il les a sur lui ; mais il me les a refusées ; il mourra plutôt que de renoncer à moi. Croyez-vous qu’il m’aime à ce point ? Je perds la tête au milieu de tant de dangers.

— Il faut une autre âme que celle de Christian pour mourir d’amour, répondit Suzanne dédaigneusement. Voulez-vous savoir combien vains sont les sentiments des hommes ? Ce Julien, qui aimait Lina hier, m’a demandée en mariage aujourd’hui, et Christian, si vous l’abandonniez, se consolerait auprès d’une autre femme comme il s’est consolé auprès de vous après ma rupture.

— Christian !… s’écria Paule avec l’orgueilleuse confiance d’une âme éprise.

— Voulez-vous que j’en tente l’épreuve ? dit Suzanne. La réussite dépend des dernières paroles que vous avez échangées avec lui. Lui avez-vous laissé beaucoup d’espoir ?