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de la vie. Après quelques jours de recueillement solitaire, je quittai Sainte-Foy où je n’avais pas assez de musique pour satisfaire ma nouvelle passion. Revenue à Lyon, je suivis le Grand-Théâtre, entendant pour la première fois tous les opéras dont vingt auditions ne m’avaient pas révélé les beautés, puis j’attirai chez moi M. Chainay, qui m’avait dit autrefois avec une raillerie douce que je n’avais pas saisie :

— Quel dommage, Madame, que vous ayez de si bons doigts pour le piano !

Je lui prouvai que j’avais mieux que des doigts, et il s’intéressa à mon instruction musicale. Une fois dérouillé, mon esprit s’exerça en tous sens. J’eus honte de l’ignorance où nous laisse l’éducation superficielle qu’on nous donne ; je cultivai mon intelligence, et je me sentis le cœur meilleur à mesure que j’élargissais le cercle de mes pensées ; mon imagination, toujours occupée, ne me jeta plus dans le danger des rêves passionnés.

Je vous dirai en passant que Christian essaya de rentrer en grâce auprès de moi. J’en étais arrivée à une telle indifférence que sa velléité de retour m’étonna. Rien de plus naturel pourtant, la chasse était fermée ; son instinct de chasseur le poussait aux seules poursuites qui