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au plan de vie que votre exemple m’a tracé, et cette malheureuse rencontre a tellement troublé mes idées que je n’en trouve plus une seule. Ce que je sais bien, et mieux que jamais, c’est que je désespère de moi. Si vous n’êtes ma force, que deviendrai-je ? Écoutez, Suzanne, j’ai essayé de me reprendre à mes devoirs ; je n’ai goûté dans leur accomplissement ni bonheur ni même repos. Mon mari ne me sait pas gré d’un retour qu’il ne comprend pas ; mon enfant n’aime pas mes caresses ; quand je le prends sur mes genoux, elle tend les bras vers sa nourrice. Le monde me fatigue, la solitude me rend folle. Je n’ai plus même la ressource de dormir, le sommeil m’échappe, et s’il vient, c’est accompagné de cauchemars et de rêves qui m’apportent le souvenir de celui que je veux fuir. Quelle sera donc ma vie ? Suzanne, vous m’avez fait beaucoup de mal ! je ne vous accuse pas ; vous espériez m’être utile ; mais vous avez désenchanté mon existence. Vous l’avez dépouillée de tout attrait, en me forçant à voir le fond cruel de toutes choses. Je n’ai pas votre énergie, moi ! Puis-je commander à mon cœur de se taire et de lui défendre de battre, dites-moi ? »

Suzanne écoutait ces reproches tumultueux