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tenir dans cet instant fugitif des émotions pour une vie entière. Mais quel bonheur incomplet que celui que l’on sait fragile ! D’ailleurs ce bonheur même me manqua bientôt. Christian repartit. Quoi de plus naturel ! L’on a pour aimer l’année entière, et pour chasser une saison seulement.

Cette fois, je n’eus pas même la satisfaction de lire le compte-rendu succinct de ses exploits. Dix grands jours se passèrent sans nouvelles de lui. Le onzième, je reçus cette lettre très-griffonnée dont je me suis munie à votre arrivée quand vous m’avez manifesté le désir de me faire une confession complète. Je n’étais pas encore décidée à vous faire une confidence détaillée ; mais, à tout hasard, j’ai pris cette lettre et quelques autres. J’en suis aise maintenant ; le récit le plus détaillé ne remplace pas ces témoins parlants qui conservent l’empreinte, le style, le degré de sentiment de leurs auteurs.

Je ne compris pas d’abord le sens de cette lettre écrite à un ami ; l’écriture grossière m’en était inconnue ; il l’avait dictée à son piqueur. La voici :

« Mon cher ami, il m’est arrivé il y a cinq jours un accident qui m’a empêché de vous écrire. Nous étions partis à quatre heures du