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une vague transparence baignait les horizons en leur donnant une profondeur, un mystère inaccoutumés, et là-bas, dans les buissons, un rossignol, innocent complice de Christian, chantait sa délicieuse plainte d’amour. Quel heureux moment, quel beau cadre pour un aveu ! La poésie du lieu et de l’heure agirent sur moi ; si je n’encourageai Christian que par mon silence, il vit mon émotion ; il sentit trembler ma main sur son bras. Bientôt il me fut même impossible de continuer cette lente promenade entrecoupée de pauses ; je sentais mon cœur oppressé par les vagues de sang qui s’y précipitaient, et je m’assis sur la terrasse. C’était par un instinct de timidité que je quittai la solitude ombreuse de l’allée et que je vins me jeter sur le banc qui domine le paysage. Christian respecta mon trouble, et je lui en sus gré. Loin d’abuser de ma faiblesse en me demandant une réponse à ses aveux, il resta debout adossé à la balustrade de la terrasse et me contemplant de ses grands yeux mélancoliques. Je voulais baisser les miens, mais son regard les appelait, et je lisais dans ses prières tant de dévouement et de tendresse que jamais duo d’amour ne fut aussi expressif, aussi complet que ce duo muet. Nous demeurâmes là je ne sais combien de temps, ne nous parlant pas,