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que cette passion qu’on avait traitée de caprice enfantin était sérieuse et profonde, puisqu’elle avait résisté à mon indifférence, aux railleries de nos parents, à l’absence et au temps. J’étais la première femme qu’il eût aimée et la seule qu’il dût aimer jamais. Je passe le développement de cette thèse. Vous connaissez le style de Christian, ma chère Paule. Il fut éloquent ce soir-là et de la manière qui pouvait le plus me toucher, car il me fit tous ces aveux aussi simplement que s’il eût causé du beau temps ou du dernier concert.

— Vous me faites rire malgré moi, malicieuse Suzanne, dit Paule. Je croyais être seule à savoir que Christian parle son amour comme d’autres parlent leur indifférence. J’avais vu dans ce calme une preuve de sincérité, me défiant de toute exagération passionnée. C’était donc là de la froideur ?

— Non, eu égard à son tempérament ; car tout est relatif. Je vous l’ai-déjà dit, dépensant en exercices violents presque toute son énergie, Christian ne peut faire honneur à ses amours que de ce qui lui reste d’ardeur. À l’époque dont je vous parle, la douceur de l’affection qu’il m’offrait fut son grand charme à mes yeux. Par mon épreuve avec Julien Deval, j’avais appris à