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elle quitta le siége rustique sur lequel elle était assise depuis le commencement de l’entretien, et elle vint prendre place sur le banc que Suzanne occupait, montrant par ce muet empressement qu’elle ne voulait pas perdre une syllabe des révélations promises. Suzanne sourit en lisant l’impatience de Paule dans ses yeux brillants de curiosité, et elle continua ainsi :

— Je ne vous ai pas parlé tout d’abord de Christian Crzeski, ma chère Paule, parce qu’en narrateur peu sûr de ses moyens, je tenais à ménager autant que possible mon petit effet. Pourtant Christian était mêlé depuis longtemps à ma vie. La propriété de son père étant mitoyenne avec celle de ma mère, comme vous le savez, il ne se passait pas de jour où Christian ne vînt jouer avec moi, dès notre enfance. Plus âgée que lui de deux ans, je le traitais toujours en petit garçon, et cette disposition si naturelle à l’adolescence ne fit que s’accroître lorsqu’à peine sortie du couvent et prête à me marier, je le revis en uniforme de collégien, gauche de mouvements dans sa haute taille mal équilibrée, à la fois timide et hardi d’allures, éveillé comme un page et rougissant sous un regard. Depuis quatre années, je l’avais seulement aperçu pendant les vacances et il n’avait pas failli à la tra-