Page:Blandy - Revanche de femme 1869.djvu/115

Cette page n’a pas encore été corrigée

à mon cœur. Je fus tentée d’agréer son repentir ; j’aimais encore, sinon lui, du moins le sentiment qui nous avait liés ; j’aimais mes souvenirs dont il était la chère image ; mais les dernières luttes avaient défloré cet amour. Dès qu’une femme est obligée de se défendre, l’homme qu’elle préfère devient pour elle un adversaire, et si elle est plus délicate que passionnée, ce débat la désenchante un peu. Enfin la rupture que Julien venait de tenter était une leçon. Il avait voulu m’échapper ; il pouvait donc me quitter un jour. Il fallait prévenir ce malheur et renoncer à un sentiment qui compromettait non-seulement ma dignité, mais encore mon bonheur présent et la sécurité de mon avenir.

Sans faire part à Julien de toutes les réflexions que je vous indique légèrement, je lui fis com- prendre que je ne le recevrais pas à merci. Je le tins sous le coup de ce dilemme :

— Ou vous m’aimez, on vous ne m’aimez pas. Si vous m’aimez, comment avez-vous pu me quitter sèchement, sans un mot d’explication ? Si vous ne m’aimez pas, quelle comédie jouez-vous en revenant ici ?

Il est avocat. Il ne fut pas à court de bonnes raisons pour colorer sa faute, mais la plus belle plaidoirie a tort quand les juges sont prévenus.