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de femme d’esprit. Le fait est que sa verve stimula ma paresse ; j’osai peu à peu produire les idées que je m’étais faites pendant ma secrète transformation.

Que vous dirai-je ? Je m’habituai à le voir, à l’entendre. Il brisait la monotonie de mon existence ; il m’apportait un air différent de celui que je respirais et qui m’étouffait par sa pesanteur ; mais cette liaison, autorisée par l’amitié de Madame Demaux, sa soeur, pour ma mère, eut si longtemps les apparences d’une camaraderie d’esprit, que je m’y livrai sans scrupules. Je ne me souviens plus quels regards, quelles paroles, ni quelles circonstances me firent comprendre que j’aimais Julien Deval. Que je l’aimais !… Osé-je dire ce mot maintenant que j’en conçois la portée ! Eh bien ! oui, je l’aimai comme je comprenais l’amour dans ce temps-là, et lui m’aima aussi, et nous n’avons pas de reproches à nous adresser mutuellement, car notre amour se valait.

Je le préférai à tous, parce qu’il était de tous le plus aimable, le plus éloquent, parce que ses lettres étaient de charmants plaidoyers, et lui me choisit parce que j’étais la plus en vue, la plus à la mode ; ma solitude d’ailleurs lui donnait de l’espoir. Sur ce dernier point, il se trompa.