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comtesse nomma à haute voix ceux de ses gens qui devaient prendre place dans la seconde. C’étaient les plus qualifiés de la domesticité : la dame de compagnie, le maître d’hôtel, les deux premiers valets de chambre. Quand vint le tour de la troisième voiture, le premier appel de la comtesse fit tressaillir Suzanne et Arkadi. La bonne comtesse toussa avant de parler, et les regarda tous les deux en accentuant presque gaiement deux on trois de ces exclamations qui émaillent les discours de tous les vrais Russes ; puis elle dit avec un accent à la fois attendri et malin :

« Axinia et ses deux petits pigeons ! »

Axinia, qui s’était dérobée jusqu’alors derrière les battants d’une porte des communs, s’avança vers la calèche et vint baiser en pleurant les mains de la comtesse. Mais c’étaient cette fois des larmes de joie.

Stéphane triomphait gravement, sans mot dire ; il tenait ses yeux brillants fixés sur Suzanne et leur regard la remerciait d’avoir eu un peu de confiance en son cœur.

« Quoi ! te voilà !  ! dit Arkadi, et pourquoi as-tu donc manqué à ta parole ?

Mon jeune père Stéphane Paulowiteh l’avait voulu ; mais il a été bon pour moi comme le seigneur Dieu. Il a parlé à un général, à un sénateur, et en un jour, l’affaire de Dorothéi, qui n’avait pu s’arranger en trois mois, a été réglée. Mon mari fera deux mois de prison, mais à l’hôpital où il sera doucement traité, le pauvre ami. Et