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— Bon ! je vais vous mener tout droit au grand canon et à la grande cloche. C’est ce qu’on montre tout d’abord. Vous devez les connaître au moins par ouï-dire. Ni l’un ni l’autre n’ont jamais pu servir.

— Et pourquoi donc ? demanda l’institutrice.

— Eh ! on n’ose pas monter la cloche là-haut de peur qu’elle n’effondre le clocher. Mais on l’admire parce qu’elle est énorme et aussi parce que toutes les femmes de Moscou ont jeté par piété, il y a deux cents ans, tous leurs bijoux dans sa fonte.

— Monsieur Arkadi, on dit que vous êtes un railleur, et je commence à le croire, dit Suzanne. Vous m’enfermez dans une citadelle dont les remparts me cachent la ville, et vous m’offrez toutes sortes d’amusettes dont je ne me soucie pas.

— Ah ! c’est la ville que vous préféreriez voir ?

— Assurément :

— Eh bien ! je vais vous la montrer. Soyez tranquille, mademoiselle. Je sais tenir une promesse. Montons au clocher. »

Quand ils furent sur la plate-forme, la première impression de Mlle Mertaud fut un éblouissement. Le panorama qui se déroulait devant ses yeux offrait un de ces aspects fantastiques que les rêves présentent seuls.

Au lieu d’avoir à ses pieds la masse monotone des toits des habitations occidentales, elle dominait une vaste mosaïque multicolore, car les toits de Moscou sont bi-