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fut saisi aux entrailles par une angoisse non encore éprouvée en voyant deux grosses larmes arrêtées au bord des paupières du comte. Même en dormant, ce père souffrait, et souffrait par son fils.

Ces deux larmes furent plus éloquentes que l’exhortation de la nuit. Stéphane se jeta aux pieds du comte et lui demanda cent fois pardon.

« Oui, je reconnais mes torts, disait-il, mais écoutez ma confession. J’ai été trop longtemps volontaire, absolu, emporté, pour avoir l’énergie de me corriger de moi-même. Je n’avais jamais douté du droit que j’avais de faire toutes ces sottises avant que Mlle Mertaud m’en fit rougir malgré moi. Elle avait raison : rien de tout cela ne me rendait heureux. J’ai essayé de me corriger d’après ses conseils ; mais sauf elle, personne ne me résistait. Je vous en supplie, mon père, laissez-moi ne pas vous quitter d’une heure ; je vous obéirai à vous, vous me formerez, vous me dresserez… oui, comme un chien rebelle, si vous voulez ; j’accepterais tout de vous avec bonheur, même de durs traitements.

— Toujours extrême donc, même en ceci ! dit le comte. Oui, mon fils, je te l’avoue, j’ai eu du chagrin cette nuit, je ne voyais plus clair dans ton âme, et veux-tu savoir d’où venait ma plus grande douleur ? Je me désespérais de ne pouvoir vivre cœur à cœur avec toi comme avec ces deux autres chers enfants de mes sollicitudes.

— Ah ! s’écria Stéphane, ils sont meilleurs que moi.