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envieux, s’élança sur la viande, la happa et l’emporta en trois bonds à l’autre bout de la cour où il se mit à l’engloutir. Mandarin le regarda faire. Il digérait un meilleur déjeuner.

« Prends le fouet, Ermolaï, cria Stéphane, et empêche cet animal de manger.

— Votre Honneur, ces chiens de Crimée sont rageurs et brutaux.

— Je ne souffrirai pas que tu me répondes-prends le fouet. »

Ermolaï obéit, en se garant du mieux possible, et au moment où le chien, furieux, allait s’en prendre à la veste brodée du valet, Stéphane lui lança Mandarin sur le dos.

Ce fut une mêlée indistincte, mais courte, et, ce qui prouve dans les animaux plus de justice distributive que certaines gens ne pensent, c’est qu’après un assaut, de surprise plutôt que de colère, les deux bêtes se séparèrent, le chien de Crimée pour courir à son déjeuner si disputé, Mandarin pour se lancer contre Stéphane qui l’avait lancé sur un ennemi dangereux. Ce grief n’était pas le premier que Mandarin eût gardé dans sa mémoire de chien contre son maître ; aussi, excité comme il l’était, il perdit ses habitudes de patience et mordit Stéphane à la main.

Après cet exploit vengeur, Mandarin, déjà honteux de sa colère, alla se cacher en gémissant derrière Mlle Mertaud qui accourait.