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« Quelles belles feuilles, n’est-ce pas ? dit Stéphane tout glorieux à Mlle Mertaud.

— Beaucoup trop, répondit-elle en souriant, et presque point de fleurs. Vous n’aurez de fruits ni cette année ni les suivantes, je le crains. Votre jardinier n’entend rien à l’éducation des plantes exotiques.

— Eh quoi ! demanda Stéphane, y aurait-il une éducation aussi pour les plantes ?

— Assurément ; si on ne les dressait pas à l’aide d’une discipline raisonnée, elles retourneraient toutes à l’état sauvage. C’est l’histoire universelle. Abandonnés à leur seul instinct, tous les êtres, plantes, animaux et… hommes poussent d’ordinaire, à tort et à travers, comme l’a fait votre pêcher. Aussi voyez ce qu’il est devenu : il ne vous donnera jamais un fruit mangeable. Vous l’avez, en le laissant à lui-même, condamné à être aussi peu utile qu’agréable. Vous avez voulu pour lui la liberté absolue : en voici les résultats. Si l’on avait émondé toutes ces branches parasites qui ont été les exubérances folles de la séve, si surtout on lui avait donné une direction, un directeur habile…

— Un directeur ! nous y voici, et je sens d’ici la leçon. C’est un apologue assez clair… Allons ! puisque ce pêcher n’est bon à rien, je vais le faire arracher tout à l’heure.

— Stéphane, dit Mlle Mertaud en souriant, remarquez que si j’ai fait un apologue, c’est vous qui l’avez complété