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dis plus rien. Au même instant, j’aperçus un groupe de jeunes gens qui traversaient la place et je me dissimulai derrière la tendine de mon balcon pour n’être pas aperçue d’eux.

C’étaient bien les chanteurs de l’esplanade ; ils causaient en marchant, et le silence de la nuit, la prononciation méridionale accentuant les consonnes, me permirent d’entendre leurs paroles. Ils étaient arrivés d’ailleurs près de notre maison.

« C’est sur cette place que la voix résonnerait bien, » dit l’un d’eux. « Il n’est pas très tard. Si nous donnions un concert à ces paresseuses de fenêtres endormies !

— Non, » dit un autre, « pas devant la maison du juge de paix. Il nous ferait une affaire sous prétexte de tapage nocturne.

— Bah ! » fit un troisième, « M. Semalens est trop bon musicien pour cela. Mais nous avons tant chanté que nos gosiers sont un peu éraillés et il ne faudrait pas nous exposer à ses moqueries. Et puis, il y a ses dames qu’on réveillerait.

— C’est juste, » reprirent les autres. Et le groupe se remit en marche.