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de ma nature, en m’y abandonnant, mais pour mon bien, pour mon incessant progrès moral.

Je souriais, accoudée à mon balcon ; il me semblait que si j’avais vu à ma portée tous les châles de laine de tante Paule et les cinq archets cassés de grand-père, je leur aurais donné des baisers reconnaissants.

Pourquoi donc avais-je pleuré, affligeant ainsi ces bons parents ? C’était une injure au bonheur dont ils m’avaient entourée jusque-là.

Oui, j’étais heureuse, je le déclarerais le lendemain matin sans attendre davantage ; heureuse de rester à Montserrou, dans une ville où les nuits sont si belles et d’où l’on voit le coteau de Palommiers, sa métairie blanche et ses grands châtaigniers tout ronds ; dans un pays où les simples artisans ont des voix de chanteurs d’opéra et font aux petites filles qui pleurnichent sans raison la grâce de bercer, de charmer leur bouderie par un chœur exécuté en plein air.

Tout en faisant ce raisonnement, je tendis l’oreille du côté de l’esplanade et je n’enten-