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des scrupules bêtes. Il y a quatre chevaux dans l’écurie de mon père et des charrettes sous tous nos hangars ; est-ce qu’on peut m’accuser d’avoir volé une laide brouette comme celle-ci ? Je la rendrai ce soir à son propriétaire qui sera trop content d’avoir obligé le fils à Joseph Courot.

— Mais tu as dit que c’était un colporteur. Ces gens-là ne sont pas du pays. Comment devinerait-il que sa charrette est à Uchizy ?

— J’ai dit un colporteur, reprit Pétrus qui s’entendait à modifier ses explications selon les besoins de sa cause. Oui, cet homme en est un ; mais il a sa famille à Uchizy. Je le connais bien. Il est à Chardonnay en ce moment ; il nous a vus passer, et, quand il reviendra par ici, il devinera bien que c’est moi qui ai pris sa charrette. »

Pétrus ajouta mille fables qui ne réussirent pas à vaincre la répugnance de Paul. Si celui-ci refusa absolument de décamper, suivant l’expression de son camarade, il ne put résister au chagrin qu’il éprouvait en voyant la robe de toile de sa sœur toute mouillée. La pluie avait tourné en averse ; elle était mêlée de grêlons qui déchiraient les feuilles des arbres et rebondissaient comme de petites balles sur la capote goudronnée de la charrette. Alice, épouvantée de se trouver si loin du logis par un tel temps et sans une grande personne pour la protéger, pleurait tout bas.

« Que les petites filles sont une engeance ennuyeuse ! grommelait Pétrus mécontent.

— Montons dans la charrette, dit tout à coup Paul. Ce n’est pas nuire au colporteur que de nous mettre à l’abri chez lui. Nous lui expliquerons cela quand il viendra, et peut-être il nous conduira à Uchizy.

— Enfin ! » s’écria Pétrus qui installa la petite fille sur le banc, sans oublier de prendre la droite.