Page:Blandy - L Oncle Philibert.djvu/83

Cette page n’a pas encore été corrigée

« Mes chers enfants du bon Dieu, leur dit-elle, en plaçant devant Paul une seconde jatte de grès pleine de lait et un morceau de pain, d’où venez-vous donc avec ce mauvais sujet de Pétrus ? Sa cousine ne se soucie point de ses visites, vu qu’il ne vient jamais à Chardonnay sans y laisser quelque sottise en souvenir de lui… Ah ! vous êtes d’Uchizy ! Eh bien, je vous conseille de vous refaire l’estomac et de vous en retourner bellement ensemble sans attendre ce chéti enfant.

— Tu n’es guère charitable, ma vieille Charlotte, dit Pétrus, en entrant triomphalement dans la maison, portant de la main droite une grande branche d’abricotier, lourde de bouquets de fruits, et de la main gauche tout un petit groseillier cassé au ras des racines.

— Voilà-t-il pas de tes coups ! dit la Charlotte. Abîmer de beaux arbres, pour que des voisins soient obligés de te dénoncer, s’ils ne veulent pas être accusés du dégât !

— Allons, répliqua-t-il, sans se décontenancer, donne-moi un verre de vin, et je laisserai chez toi les fruits que nous ne pourrons pas manger.

— Nenni, je n’en veux pas tant seulement un noyau ! Du Vin, tu en auras par respect pour ta parenté, et non par amitié toi. »

Paul et Alice refusèrent également de toucher aux fruits, de sorte que Pétrus, après s’en être bourré, alla rejeter avec dépit les branches cassées dans le jardin de sa cousine. Le frère et la sœur commençaient à s’apercevoir que leur compagnon mentait facilement. Soupçonnant qu’il pouvait les avoir abusés sur la permission donnée par Mme Chardet, ils voulurent partir aussitôt après le goûter. Alice embrassa la vieille Charlotte ; Paul, plus âgé et mieux au fait des formules de remerciements usitées dans le pays, dit à son hôtesse, au moment de prendre congé d’elle :