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de chèvrefeuille. Comme l’on était arrêté pour lui permettre d’ajuster sa coiffure, Paul aperçut sur le sol poudreux du chemin un insecte brillant comme une émeraude ; il courait très vite sur ses six pattes agiles, mais I’éclat de sa cuirasse verte le décela. Paul s’élança vers cette proie qui, se sentant menacée, se laissa choir au fond du fossé herbu, en tombant sur le dos, de façon à ne montrer que son ventre noir, ses cuisses rouges et ses pattes fauves, moins apparents à l’œil que ses étuis éclatants. Cette ruse ne dérouta pas le chasseur ; Paul sauta dans le fossé, prit délicatement l’insecte et le mit dans une petite boite percée de trous et à couvercle de verre, sans laquelle il ne sortait jamais. C’était une habitude qu’il devait à l’exemple de l’oncle Philibert.

« Qu’est-ce que tu cueilles donc là dans le fossé ? lui dit Pétrus Courot. Ah ! quelque mille-pattes ! Tu prends toutes les manies de celui qu’on appelle la bête à bon Dieu ! »

Paul devint rouge de colère.

« Qui appelles-tu ainsi ? demanda-t-il.

— Eh bien, ce n’est pas un vilain nom, dit Alice.

— En effet, reprit Paul, c’est un surnom plus flatteur que celui de chéti.

— Pas du tout ! s’écria Pétrus, en donnant à son chapeau de paille un coup de poing qui le planta tout en arrière. Les chétis, on les craint : les bêtes à bon Dieu, on leur marche dessus.

— Essaye un peu, » répartit Paul, tout à fait blessé de la moquerie lancée contre son oncle.

Et il s’avança vers son compagnon, qu’il regarda entre les deux yeux, tout en fermant les poings.

Les gens insolents sont rarement braves, et le courage leur impose ; aussi, à la grande satisfaction d’Alice, déjà alarmée, Pétrus se mit-il à rire en disant :