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accédé à toutes les idées de son fils. Lui-même n’avait rien négligé de la partie du programme qui lui incombait, et il avait assuré le bien-être matériel de sa maison.

Le logis neuf n’offrait plus la vue maussade, déplaisante, d’une bâtisse inachevée. Des persiennes brunes s’ouvraient à droite et à gauche des claires fenêtres garnies de rideaux blancs. À l’intérieur, les pièces étaient meublées, les murs couverts de papiers gais de ton, les parquets rabotés, et deux petites chambres à lits garnis de perse fleuretée s’ouvraient dans la chambre de tante Catherine, qui pouvait surveiller ainsi les enfants jusque dans leur sommeil.

Le docteur Thonnins fut reçu avec une effusion sans réserve de la part des enfants qui l’aimaient beaucoup, mais avec une cordialité qui n’allait pas chez Claude Chardet sans une certaine préoccupation anxieuse. Pendant le déjeuner, la conversation ne roula que sur l’Algérie, et le docteur raconta qu’il avait trouvé, dès ce mois de mars, à Blidah, des orangers plantés en bosquets portant à la fois des boutons, des fleurs, des fruits à peine formés et des fruits mûrs, et, à l’ombre du feuillage lustré de ces arbres, du blé poussé déjà à une belle hauteur et prêt à épier.

Claude Chardet s’émerveillait d’une telle vigueur de végétation, pendant que les enfants étaient plus intéressés par les péripéties de la traversée, par la peinture des costumes locaux, des caravanes de chameaux qui défilent dans la rue Babazoun, et par ces traits de mœurs qui frappent d’emblée les voyageurs abordant pour la première fois notre colonie africaine.

La causerie se fût prolongée davantage si une plaisanterie du docteur au sujet des concerts arabes, à tonalités sourdes, piquées de sons aigus, n’avait rappelé à sa nièce qu’elle lui avait préparé une surprise.