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aimait la vie des champs d’un amour plus élevé, moins terre à terre que celui de son père ; mais la différence de leurs goûts ne leur permettait pas de s’entendre à ce sujet. Elle ne nuisait cependant pas à la tendresse de leurs rapports. Philibert respectait dans le maître des Ravières la bonté paternelle cachée sous de rudes apparences, la sûreté de caractère, la rectitude de jugement qui le distinguaient. Quant à Claude Chardet, lorsque des Chizerots le questionnaient malignement au sujet des occupations mystérieuses de son fils, il ne manquait pas de répondre :

« Il y a des gens riches qui ont des fils si dépensiers, et d’une si mauvaise vie, que je me félicite des manies tranquilles de mon Philibert. »

Ce mot révélait le peu d’importance que le maître des Ravières attachait à des travaux dont il ne comprenait pas la portée, comme l’exclamation qu’il poussa, lorsque Philibert lui exposa son programme personnel, décelait chez lui ces habitudes parcimonieuses dont il ne faudrait pas trop médire, vu que ce sont elles qui édifient sou à sou, par l’épargne, de solides fortunes et qui aident ainsi à la prospérité de la France.

« Faire venir des maîtres de Tournus, acheter un piano de mille francs !… Tu veux donc me ruiner ? Tu veux que nous prêtions à rire aux commères du château. Elles diront que nous singeons les seigneurs d’autrefois.

— Il faut bien que la gazette d’Uchizy ait son numéro chaque jour, répondit Philibert en souriant. Quand les femmes du quartier du Château sont assises à leur porte, elles causent de tout et de tous, comme les gens dont l’esprit n’est pas occupé, et, quoi que vous fassiez ou ne fassiez pas, elles le salueront toujours d’un coup de langue. Faisons bien et laissons dire, c’est ma devise. Quant à vous ruiner, non, ce n’est pas